Histoire du TKC

Le Professeur ETOUNDI ESSOMBA MANY, membre influent de Tonnerre retrace dans les lignes qui suivent l’histoire de cette équipe. Un récit passionnant et édifiant.

Fils d’OMGBA NSI et plus jeune de cinq ans que son frère André FOUDA, celui que les sportifs camerounais avaient surnommé « Mal Type » aura peut-être été l’homme ayant donné à notre sport-roi ses lettres de noblesse par sa grande ouverture d’esprit et sa grande sportivité.

En effet, OMGBA ZING aura toute sa vie durant été le modèle même du sportif tant dans sa vie privée que publique. Dans les années 30, il fonde le Canon Kpa Kum avec MANGA BELIBI que nous avons inhumé quelques heures seulement avant la énième explication entre les deux « frères ennemis » Canon-Tonnerre.

Il était une fois le Tonnerre de Yaoundé

Le Professeur ETOUNDI ESSOMBA MANY, membre influent de Tonnerre retrace dans les lignes qui suivent l’histoire de cette équipe. Un récit passionnant et édifiant.

Fils d’OMGBA NSI et plus jeune de cinq ans que son frère André FOUDA, celui que les sportifs camerounais avaient surnommé « Mal Type » aura peut-être été l’homme ayant donné à notre sport-roi ses lettres de noblesse par sa grande ouverture d’esprit et sa grande sportivité.

La création de Kpa Kum mérite qu’on s’y attarde un instant. Dans les années 30, les équipes de Football, sport de détente par excellence, introduit au Cameroun grâce au photographe togolais GUETHE qui tenait sa boutique en face d’Akwa Palace, n’étaient réservées qu’aux expatriés des deux grandes métropoles : Douala et Yaoundé. Cette discrimination raciale sera brisée cependant un certain 14 juillet 1930 par le gouverneur qui organise une rencontre amicale entre les équipes de Douala et de Yaoundé. Ce haut fonctionnaire, soucieux du prestige d’asseoir Yaoundé comme capitale politique de la colonie, fait un panachage de l’équipe locale en y incluant certains indigènes dont un certain TOBIAS MIMBOE, Alias Bayard, ou « essuie glace » dont son petit-fils Emana rappelle étrangement le style aujourd’hui. L’équipe de Yaoundé remporte la victoire après avoir tant et si bien ridiculisé celle de la côte qu’il en coûta au héros du jour, Bayard, quelques jours d’emprisonnement pour motif d’avoir couvert de honte par ses dribles déroutants les Européens. Les feintes de corps de TOBIAS MIMBOE restent gravées à jamais dans la mémoire de tous ceux qui l’ont vu évoluer au stade de l’ancienne Présidence de la République : il planait littéralement sur les stades, se retournait après la feinte de corps et lâchait à l’adresse de son adversaire son cri de guerre : Bayard ! C’était le Milla Roger Albert d’Antan.

Omgba Zing qui faisait aussi partie de l’expédition initiatique, fonfe le 9 novembre 1930 à Mvog-Mbi dans la résidence de Jene Herman, le Canon sportif et est élu premier président du Club. Le nom de Canon avait été suggéré par la nature de cette arme qui avait fait tant de victimes dans les rangs des Allemands en 1914-18.

A la suite de la victoire en coupe baptisée des Cigarettes nationales, le capitaine OMGBA ZING fait le tour des chefferies traditionnelles : Amougou Anaba à Mvog Manga chez les Banés, Ahanda Noah chers les Yanda, Ateba Ebe chez les Eton et ramene un pactole qu’il confisque à son seul profit, d’où son surnom de Mal Type que lui donna Bouli.

Il claque donc la porte à la suite de cette brouille avec l’Equipe fanion de Mvog Mbi et fonde en novembre 1934, son Club à lui, le Tonnerre avec quelques éléments que la postérité footballistique camerounaise aurait tort d’oublier : Ndono René, Atangana Victor, Ada, Belibi Nku et autre Etoundi Linus, tous Béti évidemment.

Reconverti dans l’arbitrage

Mais une nouvelle querelle surgit au sein de cette nouvelle formation qui voit le départ d’Ada et de Belibi Nku au Canon, tandis qu’Atangana Victor (ATAVIC), Ndono René et Etoundi Linus créent à leur tour l’Eclair qui deviendra plus tard le Lion d’aujourd’hui, le trusteur des coupes.

Donc, dans son fief à Mvog-Ada, OMGBA ZING, Capitaine de son propre Club, ne recrute d’abord au sein de son équipe que les jeunes de la famille Mvog-Ada. C’est ainsi qu’on aura vu évoluer tour à tour Ada, Fouda, Engoudou, Ahanda, Essono Pascal dit le fou au sein du club, tous issus de la famille, après avoir reçu leur baptême de feu à l’emplacement de l’actuel Institut Samba.

OMGBA ZING était un attaquant de pointe véloce. Récupération de balle et rapidité d’exécution, alliées à une bonne condition physique étaient ses atouts majeurs, un attaquant de race comme on se plait à le dire aujourd’hui. Blessé au genou, après un match âprement disputé avec l’éternel « ennemi », le Canon, il se reconvertit dans l’arbitrage et l’on retiendra pour mémoire qu’OMGBA ZING aura été le premier « Nègre » à diriger une rencontre internationale avec une équipe de France au stade de l’Hippodrome. Incorruptible, à cheval sur les règles qui gouvernent ce sport, OMGBA ZING n’hésitait pas un seul instant à requérir même contre son propre Club le Tonnerre, la sanction suprême, le pénalty, si la faute était commise, à la limite seulement de la surface de vérité. Bien d’hommes en noir devraient aujourd’hui s’inspirer de ce chevalier du sifflet et si l’on ajoute qu’à l’époque, il fallait avoir des nerfs d’acier pour arbitrer un match opposant une équipe du Littoral à celle de Yaoundé, la compétition entre les deux grandes métropoles a peut-être encore de beaux jours devant elle. Mais dans les années 50, c’était une véritable guerre des tranchées.

Un certain Canon-Caïman en 1939 aura marqué l’époque par un score sans appel de deux buts à zéro, que les Béti entonnaient leur cri de guerre « Ze ene a bemba », la panthère dans la bergerie, le combat changea d’âme dans les dernières minutes avec le virevoltant « Mbassa de feintes », les Akwa boys égalisaient dans les toutes dernières minutes bien qu’on comptait dans les rangs du « Kpa Kum » le feu follet de l’époque, Bouli dit « je m’amuse » ! Le match se termina dans la confusion totale, les Béti, écorchés vifs provoquèrent une bagarre qu’on eut du mal à arrêter.

Le «Fou» époustouflant

La demi-finale Tonnerre – Caïman comptant pour la coupe Bastos en 1952 est à classer dans cette catégorie de matches anthologiques. Cette rencontre se joua deux fois. D’abord le dimanche 1er juin 1952 à Yaoundé. Le Caïman fut battu, mais le comité de la Ligue décida, pour des raisons « techniques » (SIC) que le match devait être rejoué le dimanche 3 juin à Douala, au stade Akwa.

Là encore, ce fut un 4-2 en faveur du Tonnerre. Abouna, Troki et Essono Pascal dit « le fou » avaient fait un match époustouflant. C’était la première fois qu’une équipe de Yaoundé prenait le dessus sur celle de Douala, le berceau du football camerounais.

Finalement le titre de Champion se disputa entre deux équipes de la capitale, le Tonnerre et le Canon, et le T.K.C battit le Canon par 3-1, buts inscrits tour à tour par le virevoltant capitaine de l’équipe. Engoudou, puis Troky, puis encore Engoudou. Le Tonnerre remportait là son premier titre de Champion du Cameroun. C’était en 1952.

Avec la fortune tirée de l’immobilier, OMGBA ZING élargit l’assise tribale du Tonnerre. Le père Mayor, manchot, était à la fois l’entraîneur de l’équipe et attaquant de pointe, et les grandes rencontres imposaient une retraite spirituelle dans son presbytère à une dizaine de kilomètres sur l’ancienne route d’Akonolinga, à Nkol-Afamba.

Le style Tonnerre date surtout de l’époque du Révérend Père Mayor. Le recrutement se fait d’abord dans les rangs des lycéens, ce qui crée une instabilité évidente par la mobilité de cette population devenue adulte donc responsable dans la Fonction publique, mais « but last not least » ce qui imprime un style élaboré, « scientifique » à l’équipe. Et ce n’est pas sans raison que je me suis écrié, un jour d’octobre 1968, au stade militaire « Kalara » ! Devant le monopole pendant plusieurs minutes au ballon par mes « agneaux » devant un Caïman aux abois : Mbozoa donnait du tournis à Mbette Isaac dit le sorcier. L’étiquette est donc restée. Le style, beau certes, sacrifiait l’efficacité.

Omgba Zing disparu, son œuvre n’en reste pas moins impressionnante « Mal Type » aura suivi jusqu’à ses dernières heures la politique de détribalisation du sport.